TERRITOIRE EN MOUVEMENT ET CORPS AU REPOS: UN INVENTAIRE DES HALTES ROUTIERES QUEBECOISES

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Ce projet de recherche-conception propose un inventaire des haltes routières du réseau routier québécois afin d’explorer, par le projet de design, leur relation au territoire, à l’appareil gouvernemental et à l’imaginaire culturel. Il repose sur le fait de voir, dans la halte routière, non seulement une offre de services aux voyageurs, mais un dispositif biopolitique déployé à l’échelle du territoire.

La halte routière met en jeu politique et bureaucratie provinciale, mécanismes de privatisation des biens publics, identité culturelle et biologique, questions de genres, gestion des corps, hygiène publique et pratiques illicites. Bien au-delà de leur potentiel en tant que lieux pouvant mettre en valeur le territoire et le paysage local, les haltes routières forment une vaste constellation d’interfaces culturelles qui associent l’appareil gouvernemental aux personnes en mouvement. Celles-ci expriment donc la prise en charge, par l’état ou la municipalité, des fonctions biologiques des voyageurs, renforce l’agencement socio-matériel du territoire tout en étant un lieu de différenciation et, surtout, participe activement au contrôle et à la régulation de ces fonctions et de cette organisation en les territorialisant.

Au Québec, le développement des parcs routiers va de pair avec la modernisation de l’état et la construction du réseau routier dans la deuxième moitié du 20e siècle. La grande majorité des haltes routières furent construites dans les décennies 1960 et 1970 et celles-ci conservent un langage architectural allusif au vernaculaire et un lien avec l’état (gestion). Bien qu’elles soient modèles de « non-lieux », leur architecture et la responsabilité gouvernementale confèrent au parc des haltes québécoise un lien symbolique par rapport à l’identité culturelle inscrite dans le territoire et à la prise en charge publique des services aux voyageurs. Le projet de modernisation des haltes québécoise gérées par le Ministère des Transports du Québec (MTQ) se développe lentement depuis près de 30 ans, mais s’est accéléré dans les années 2000. Le MTQ, qui gère 102 des haltes routières de la province (213 sont municipales), est en voie de produire des relevés en vue de leur modernisation et potentielle privatisation. Nous nous trouvons donc à un moment charnière de la transformation du réseau des parcs routiers, une situation qui appelle et justifie de se pencher sur la place que ces haltes occupent dans l’imaginaire collectif et sur leurs liens avec le territoire. Incidemment, une des contributions principales du projet réside dans le contexte particulier de manque de documentation des haltes et de l’importance d’en faire un relevé (autre que technique) dans la foulé de leur modernisation.

Le projet inclut la documentation sur le terrain, l’exploration par la photographie et le dessin dans le cadre d’une première phase d’investigation, de synthèse des données et d’expérimentation menant éventuellement, lors d’une seconde phase, à la réalisation d’un livre et d’une exposition.

Thomas-Bernard Kenniff, Bechara Helal et Virginie Lasalle
Le projet bénéficie du soutien de la Faculté des arts de l’UQAM et du Ministère des transports du Québec.

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